Le mot de la présidente du RWSN: Kelly Ann Naylor, UNICEF, Co-auteur : Dr Kerstin Danert, responsable du Thème Développement Durable des Eaux Souterraines de RWSN
Le thème de la Journée mondiale de l’eau de 2019, du World Water Development Report des Nations Unies, de la Semaine mondiale de l’eau à Stockholm et de la série de webinaires RWSN du printemps 2019 était le même : “Ne laisser personne de côté”. Que signifient réellement ces mots et quelles en sont les implications pour nous, les professionnels de l’eau en milieu rural, ainsi que pour le financement des programmes et des projets que nous mettons en œuvre ?
La résolution 70/1 de l’Assemblée générale des Nations Unies intitulée “Transformer notre monde : l’Agenda 2030 pour le développement durable” stipule qu’il ne faut laisser personne de côté. Cela nous demande d’analyser qui a été exclu de la prestation de services, de la prise de décision et du développement ; de découvrir pourquoi ; de déterminer ce qui peut être fait et de prendre des mesures pour que les personnes marginalisées dans le passé soient incluses maintenant et à l’avenir. Deuxièmement, il s’agit de travailler de manière transversale entre disciplines et “thèmes de développement” pour combler les lacunes.
Permettez-moi d’illustrer le premier point par un exemple fictif : “Le pays X a connu une croissance économique rapide au cours des deux dernières décennies, qui s’est traduite par une amélioration substantielle de la richesse et du niveau de vie des populations dans trois des cinq régions du pays. Entre-temps, la vie de la majorité des habitants des deux autres régions, essentiellement rurales, n’a guère changé en cinquante ans. Une proportion non négligeable de la population y vit toujours dans l’extrême pauvreté et n’a pas de sécurité. L’écart de richesse entre les différentes régions du pays s’est creusé et, pour aggraver la situation, les populations les plus pauvres des régions les plus pauvres ont peu de voix ou d’influence dans la prise de décision au niveau national. L’objectif de Ne laisser personne de côté exige de demander au gouvernement et aux partenaires, ainsi qu’aux bailleurs de fonds, de comprendre pourquoi ces deux régions sont restées marginalisées, d’explorer ce qui peut être fait pour remédier au déséquilibre et de prendre des mesures. S’attaquer aux inégalités spatiales (géographiques) comme le montre l’exemple ci-dessus n’est qu’un exemple parmi d’autres des mesures prises pour ne laisser personne de côté. Selon le contexte, les inégalités se manifestent dans de nombreuses dimensions, y compris, mais sans s’y limiter, le sexe, la capacité, l’âge, l’origine ethnique, les castes et l’éloignement. Il peut également y avoir des chevauchements entre ces dimensions.
Le deuxième point, qui porte sur le fait de travailler de manière transversale entre plusieurs thèmes de développement, est bien illustré dans les objectifs de développement durable (ODD) qui sont interdépendants. Les professionnels de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène (WASH) peuvent se concentrer sur l’ODD 6 – Eau potable et assainissement, mais l’eau potable est directement intégrée dans l’ODD 1 – Mettre fin à la pauvreté (services de base), l’ODD 5 – Egalité des sexes (temps consacré au travail domestique non rémunéré, et femmes occupant des postes de direction) et l’ODD 4 – Éducation de qualité (Eau, Assainissement et Hygiène (EAH) dans les écoles). Tous ces éléments sont tout aussi importants que l’ODD 6.
Ce point est également ressorti d’une évaluation récente du programme d’approvisionnement en eau potable en milieu rural d’UNICEF: si nous voulons nous assurer que personne n’est laissé de côté et nous attaquer fondamentalement à la pauvreté rurale, nous devons, en tant que professionnels de l’eau en milieu rural, envisager de dépasser les limites de l’eau potable et du “monde de l’EAH”. Pour transformer la vie des populations, les infrastructures de l’eau doivent répondre à un plus large éventail de besoins ruraux – approvisionnement domestique, jardins familiaux, entreprises rurales et transformation rurale ainsi que l’eau potable. Nous devons aborder les questions de genre afin que les femmes et les enfants ne “fassent pas le travail d’un tuyau ” car ils passent une grande partie de leur vie à transporter de l’eau sur de longues distances. Nous devons veiller à ce que les personnes handicapées puissent satisfaire leurs besoins en eau et mener une vie digne.
D’ici la fin de l’année, l’UNICEF publiera de nouvelles directives sur l’équité dans le secteur de l’EAH. Nous espérons que cela contribuera non seulement aux efforts que vous entreprenez déjà, mais que ces directives pourront vous inspirer à faire encore plus pour remédier aux inégalités. Entre-temps, commencez à poser des questions sur les personnes qui sont laissées pour compte, ainsi que sur ce qui peut être fait et pourquoi. De plus, songez à contacter vos collègues et amis qui travaillent pour transformer le monde rural, ou sur les questions de genre, la nutrition et l’éducation pour voir s’il existe des moyens de travailler ensemble pour ne laisser personne de côté en milieu rural.